Bernard Tschumi; l'architecture déconstructiviste
20 avril 2018

Bernard Tschumi; l'architecture déconstructiviste

L’architecte franco suisse imprime sa griffe partout dans le monde. Portrait d’une forte tête qui d’un concept fait une forme novatrice.

227 West 17th Street, au cœur du quartier new-yorkais de Chelsea. C’est ici, au 6e étage que vit Bernard Tschumi - architecte d'origine suisse romande, née en 1944 à Lausanne - dans un espace identique à celui de l’atelier, qu’il avait aménagé en 1988 en un loft sophistiqué, blanc et noir. Sur l’un des murs de son appartement, l’architecte franco-suisse a accroché un planisphère sur laquelle sont plantées des épingles de différentes couleurs : les constructions achevées, en cours et les projets. Les épingles multicolores s’étirent de Pékin à Cincinnati.

 

La fulgurance de l’architecture

 

De New York où Bernard Tschumi vit, enseigne et dirige l'agence d'architectes BTua, Lausanne et son boulevard de Grancy paraissent très loin. C’est pourtant là que la famille Tschumi – venant de Paris – s’est installée au milieu du siècle dernier. Bernard Tschumi avait 10 ans. L'architecture, pour lui, c'était les chantiers. Il les visitait avec son père, Jean, architecte lui aussi, rentré en Suisse pour une courte carrière fulgurante : le siège de Nestlé à Vevey, celui de la Mutuelle vaudoise à Lausanne, un étonnant silo à Renens.

 

Un pedigree de bâtisseurs

 

Peut-on échapper à sa filiation quand on est fils d’architecte ? Bernard Tschumi a attendu l’âge de 39 ans et amorcé beaucoup de détours avant de se décider et de signer sa première œuvre : le parc de La Villette, à Paris. L’architecte franco-suisse a papillonné. D’abord à Minneapolis, où il est propulsé en 1961 par une bourse d’études. Il n’y reste pas et plébiscite davantage New York pour terminer son séjour. Entre fascination et découverte, la Grande Pomme le scotch. Bernard Tschumi a une révélation. Il sera architecte, comme son père Jean qui décédera un mois après cette illumination. Bernard a 18 ans.

 

La passion de la déconstruction

 

La suite du détour est un moment d'histoire. Son diplôme d’architecture de l’ETFZ en poche, Bernard Tschumi participe activement à la grande excitation intellectuelle de mai 68, à Paris. C'est peut-être bien les architectes et les artistes qui étaient alors les plus radicaux. Ils étaient en révolution, structuraient ou déconstruisaient, au point de ne plus bâtir. Engagé dès ses débuts dans une vaste recherche théorique, Bernard Tschumi enseigne d’abord à l’Architectural Association, où il compte Rem Koolhaas et Zaha Hadid parmi ses collègues. Il ignore alors que l’architecture constituera son langage. C’est à New York qu’il consolide son outil intellectuel et artistique avant d’accéder à la moindre construction.

 

Paris-New York-Paris

 

Mais à force de théoriser, Bernard Tschumi a besoin de pratique. Il s’y met en 1983, à l’aube de ses 40 ans, en remportant le concours pour le Parc de la Villette. En y regardant de plus près, le plan du parc parisien ressemble à Manhattan. Dès lors, les deux villes ne vont plus cesser de s’entrelacer. À New York, Bernard Tschumi prend la direction de la prestigieuse École d’architecture de l’Université de Columbia en 1988, en même temps qu'il ouvre son atelier à New York.

Le 11 septembre 2001, une nouvelle formidable est arrivée dans le loft de la 17e rue. Tschumi Architects venait d'être choisi à Athènes pour construire le musée de l'Acropole au pied du Parthénon. Bernard Tschumi est descendu à l'atelier, tout le monde était heureux. Puis quelqu'un est venu dire qu'un avion avait percuté une tour du World Trade Center. Ils sont montés sur le toit, ils ont vu arriver le deuxième Boeing. Bernard Tschumi immortalise cette agression contre la ville. L'architecte est alors associé aux réflexions sur la manière dont Manhattan pouvait répondre et renaître. Puis tout s'est perdu dans des jeux d'intérêts financiers et politiques. Alors Tschumi et les siens ont renoncé à s'en mêler, malgré leur désir initial.

 

Une forte tête

 

En Suisse romande, Bernard ­Tschumi agace. Il parle avec aisance, écrit de même et construit, par-dessus le marché, des ouvrages prestigieux. Dans le milieu des architectes, on ne lui fait pas souvent les yeux doux. Mais comme son père en son temps, Bernard Tschumi marque l’architecture romande.  Il y a réalisé le nouveau siège de la manufacture horlogère Vacheron Constantin à Plan-les-Ouates (GE), la transformation de l'ancienne fabrique Iril à Renens (VD) en école d'art (ECAL), la gare du Flon à Lausanne ou la Carnal Hall de l’École le Rosey, à Rolle.

Bernard Tschumi a passé la moitié de sa vie à comprendre l’architecture. À 74 ans, il esquisse enfin des pistes de réponses. Selon lui, pour comprendre l’architecture, il ne faut pas se demander à quoi cela va ressembler, mais ce qui se passe dans son espace, le mouvement qui l’habite.

 

Ses plus grandes réalisations

 

Zoo de Vincennes, Paris

 

 

Carnal Hall, Rolle

 

 

La Tour bleue, New York

 

 

Le Zénith, Rouen

 

 

Musée de l’Acropole, Athènes

 

 

Parc de la Villette, Paris

 

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